EFFET D'ANNONCE publié le 17 mai 2014
Les exigences de la politique, entre action et communication, sont devenues un casse-tête pour les gouvernements. Si vous agissez et travaillez sans le montrer, ou en le montrant mal, l'opinion vous renvoie dans vos buts. Si vous communiquez habilement, de manière visuelle et acoustique - ce qu'exige la télé -, on vous accuse de gesticulation et, nous y voilà, d'effet d'annonce. C'est peut-être l'effet, plus que l'annonce, que l'on reproche aux politiques, sous-entendant ainsi qu'ils épuisent leur énergie à annoncer leurs intentions, et non à les réaliser. (…)
Les exigences de la politique, entre action et communication, sont devenues un casse-tête pour les gouvernements. Si vous agissez et travaillez sans le montrer, ou en le montrant mal, l'opinion vous renvoie dans vos buts. Si vous communiquez habilement, de manière visuelle et acoustique - ce qu'exige la télé -, on vous accuse de gesticulation et, nous y voilà, d'effet d'annonce. C'est peut-être l'effet, plus que l'annonce, que l'on reproche aux politiques, sous-entendant ainsi qu'ils épuisent leur énergie à annoncer leurs intentions, et non à les réaliser. (…)
Annoncer
est pourtant un mot vénérable et de haute moralité. Pensez donc,
ad-nuntiare,
c'est
« envoyer un messager », (…) quasiment un ange annonciateur.
Mais l'envoi de l'ange Gabriel à la Vierge Marie, pour lui annoncer
la bonne nouvelle, s'est bien affaibli dans notre parole quotidienne.
Les plus actifs des annonceurs ne sont certes plus des anges,
mais des publicitaires : on est alors assez loin des sublimes
annonciations de la peinture italienne, ou de L' Annonce faite à
Marie de Paul Claudel.(...)
De
la solennelle prophétie et des signes, présages et
augures, l'annonce s'est banalisée, devenant un modeste terme
de belote prolétaire ou de bridge bourgeois.
Reste
l'annonce d'un brillant programme d'action, censé séduire et
enthousiasmer le citoyen-électeur. Les médias en font leurs choux
gras et la vente des apparences y produit son petit effet. L'effet
d'annonce n'est pas l'enfant du message angélique, mais plutôt de
ce que nous continuons à appeler, malgré toutes les académies, le
marketing. (…)
En
attendant, puisque les actes et les décisions, s'inscrivant dans la
réalité, ne peuvent que décevoir, les belles intentions, les
bonnes volontés pétulantes et les projets mirobolants, actualisés
sous forme d'annonces, produisent leur effet immédiat.
Annoncez, annoncez, peu importe qu'il en reste
quelque chose.
Alain
Rey
A mots découverts (
chronique du 4 juin 2002)
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